top of page
  • Mathilde Bourmaud

I'm not your Man


Elle pourrait être à l’image de son île : Maurice. Cette île singulière qui s’est construite à la force de ses mains en plein cœur de l’océan indien ; cette nation arc-en-ciel où cohabitent sur 2000 km2 toutes les croyances, traditions et religions. Elle, c’est Christine Marot, CEO de BLueLife (société leader du marché immobilier sur l’île) et membre du Women Directors Forum. Une femme d’une trempe qu’on remarque mais surtout qu’on écoute. De celles qui savent qui elles sont et surtout ce qu’elles ne veulent pas devenir, quit à refuser un poste en clamant « I’m not your man ! ». Entre conviction et adaptation, humanisme et féminisme, réflexion et indépendance, Christine Marot revient sur son parcours un peu comme à l’image de ses ancêtres français se frayant des siècles en arrière leur chemin sur une île encore vierge. Un parcours singulier qui s’est construit à la force de son travail : une de ses raisons de vivre. A la force de ses valeurs et convictions : ses raisons d’être ! A la mesure de son ambition : être soi !

Au volant de sa voiture, Christine Marot me parle de Maurice comme de son berceau. Celui qui l’a vue naitre puis grandir. Celui qui la voit aujourd’hui agir comme s’épanouir entre Tamarin où elle réside à l’ouest, et Roches Noires où elle travaille, à l’est. Une traversée quotidienne d’une heure qu’elle effectue matin et soir. Un trajet telle une parenthèse essentielle pour prendre toujours un peu plus conscience de ce qu’il entoure. Un temps qu’elle dédie à la réflexion. Un temps toujours accordé au présent, sa gymnastique de vie. « Je ne me suis jamais projetée quelque part. Mon ambition était simplement de faire ce que j’aimais faire. Quand des opportunités se sont présentées, je me suis toujours posée la question et pour les bonnes raisons du ‘j’y vais ou j’y vais pas ?’. Et je suis arrivée là. ».

Là, où elle officie désormais depuis 2015 en tant que CEO de la société BlueLife. Une société immobilière cotée en bourse et appartenant au groupe mauricien IBL (groupe opérant dans divers secteurs, de l’agriculture aux services financiers).

I’m not your man !

Pourtant, quand on lui propose le poste pour la première fois, elle répond « I’m not your man ! ». Si Christine Marot sait clairement qui elle n’est pas, elle ne voit peut être pas encore ce que son patron et mentor visionnaire, Cyril Lagesse, voit en elle. Une personnalité capable de mener avec sa singularité, une société qui a pour ambition le plus gros projet immobilier jamais réalisé sur l’île : Azuri. Un village de plus de 380 propriétés pour locaux et étrangers. Une smart city qui, avec le bonheur comme étendard, est pourtant tout aussi bien accueillie que mal perçue par une partie de l’île. « La première fois que la question a été évoquée, j’ai refusé. J’avais du mal à voir cette évolution au départ. Je ne voulais pas me retrouver dans une situation où je ne pourrais pas suivre mes valeurs qui m’animent. Celles de l’honnêteté, de l’intégrité, de la droiture ». A ce moment là, Christine Marot s’épanouit dans le milieu de la finance, une voie choisie sous l’influence paternelle. « Dans cette société patriarcale, c’est le père qui décidait encore. Ma mère, je ne l’ai jamais connue travailler. Elle est restée au foyer, comme il était de coutume, pour s’occuper des enfants.»

Mais la proposition du groupe IBL revient sur la table. Et c’est, soutenue par son mari voyant en cette offre faite à son épouse la reconnaissance de ses compétences et de ses qualités, que Christine Marot reconsidère les choses. « C’était la récompense pour tout mon travail effectué depuis des années. » Une proposition qu’elle va accepter à juste titre et à une seule condition : être soi.

Entre conformisme et indépendance d’esprit

Christine Marot se refuse à rentrer dans le moule du patron. Encore moins dans l’idée qu’on pourrait se faire de la CEO qui agit comme un homme parce qu’elle est arrivée à une position normalement réservée à ce dernier. Cette position qui par souci d’égo amène parfois dans la course folle du pouvoir. Son jeu du pouvoir à elle sera celui d’être fidèle à elle-même - ce pourquoi elle est là - quit à déjouer les codes d’un milieu bien établi et… masculin. Au sein du village Azuri, où se poursuit la rencontre, Christine Marot incarne sa fonction comme elle vit sa vie. Dans le respect. La collégialité et l’esprit d’équipe. « Mon ambition en tant que CEO, c’est que chacun trouve sa place et soit bien, là où il est » Femme comme homme. On y reviendra.

Droite mais diplomate, la CEO, main de fer dans un gant de velours, a démontré en trois années une manière humaine de diriger tout en s’adaptant aux enjeux de sa fonction. Entre les francs tireurs qui font légion et la gestion d’un projet qui va rencontrer des défauts de construction dans sa phase de développement, Christine Marot va au front, met le doigt où ça ne va pas, tranche et s’impose. En ajoutant toujours la justesse de la forme au fond. Le fond du coeur. « Et ça je n’y déroge pas.» Dans le respect du travail bien fait : sa première ambition. Et dans le respect de son île : son héritage. A travers les responsabilités qui lui incombent, Christine se veut d’être encore plus consciente des enjeux environnementaux. « On regarde vers le futur, mais un futur qui est balisé et pensé. Je veux que mes enfants puissent dire : ma mère a contribué à une nouvelle façon de faire et vivre. » Construire demain !

« Si on est conscient l’un de l’autre et de ce qui nous entoure, on ne peut que faire un lieu de bien-être ».

Dans l’action plus que dans la revendication

« Si on est conscient l’un de l’autre et de ce qui nous entoure, on ne peut que faire un lieu de bien-être » Cette autre phrase glissée entre deux, pourrait être finalement celle qui illustre au mieux Christine Marot et ses idéaux. Sa volonté à faire le lien entre les gens, entre un monde plus matériel et une réalité du terrain où elle est engagée. A sa façon. Parce qu’il est important de dire les choses, révéler ce qui ne va pas et faire en sorte que ça avance.

Et à juste titre. Dans la société mauricienne où se sont développées des inégalités en même temps que de nouveaux droits des femmes apparaissaient (à l’instar des sociétés occidentales), Christine Marot, membre du Women Directors Forum, est convaincue du facteur travail, sa passion, comme levier d’épanouissement, son épanouissement et celui des autres. Un empowerment « donnant aux femmes le droit de pourvoir faire des choix de vie ».

« Ça m’aurait profondément dérangée d’être à mon poste pour être une statistique, plutôt que par mon travail. »

Mais à une nuance près. Celle qui, de par sa vision humaniste aimerait voir tout à chacun reconnu pour la spécificité de son entièreté plus que du genre qu’il revêt, ne croit pas foncièrement au pouvoir de la revendication ou encore de la politique des quotas dite de discrimination positive. « Ça m’aurait profondément dérangée d’être à mon poste pour être une statistique, plutôt que par mon travail. » Ça aurait été finalement une ironie du sort pour celle qui tente d’inspirer - par son parcours et ses rencontres, son mentor : qu’il est possible aux femmes d’être reconnues à juste titre, et aux hommes d’ouvrir leur mentalité au changement. Ce serait finalement une erreur de jugement pour celle qui est attachée au principe de son île : assumer les différences de tout à chacun et les relier entre elles.

A la notion de « Girl Power », Christine Marot me répondra définitivement par celle du « Soft Power ». Pas un pouvoir qu’elle revendique mais qu’elle a construit, comme à l’image de ses ancêtres venus en terrain vierge, par delà les obstacles inhérent à tout chemin entrepris. D’ailleurs, s’agirait-il plus d’une recherche du pouvoir que d’ambition, voire d’épanouissement ? « Si être ambitieuse ou féministe, c’est chercher un épanouissement, je le suis ! »

You Might Also Like:
bottom of page