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  • Soisic Belin

La « sexpert", Maïa Mazaurette en 1, 2, 3 actus !


Nous sommes début janvier, les grèves ne me permettent pas d’aller à la rencontre de LA sexpert, Maïa Mazaurette (de passage à Paris pour la promotion de ses deux ouvrages, en tout 623 pages dédiées au plaisir charnel). C’est dommage, j’aime la lire et je ne suis pas la seule. C’est donc par téléphones interposés que cette interview aura lieu et quelle joie de découvrir à l’autre bout des ondes, une jeune femme débordante d’énergie et passionnée par son métier. Hyperactive, aucun instant n’est laissé au hasard et pour cause, elle nous offre en cette rentrée de janvier Sortir du trou, lever la tête aux éditions Anne Carrière - dans la toute nouvelle collection Sex Appeal dirigée par Camille Emmanuelle - et Le Sexe selon Maïa, Au delà des idées reçues aux éditions de la Martinière, ainsi qu’une exposition de ses peintures … Pluridisciplinaire, vous dis-je ! Et talentueuse surtout !

Avec « Sortir du trou, lever la tête » vous nous proposez une sorte d’état des lieux de la sexualité aujourd’hui en 2019-2020 avec un constat, des anecdotes et des pistes, comme un fil à tirer pour trouver des solutions. Tout ça sur un sujet qui pourrait paraître trivial à certain.e.s : la sexualité. Qu’est-ce que l’étude des sexualités pour vous ?

Il y a encore et toujours cette question de la priorisation des luttes, comme si dans la vie il n’y avait qu’un seul et unique combat, comme si on ne pouvait pas résoudre plusieurs problèmes en même temps. Et puis, il y a aussi cette idée que la sexualité serait trop intime, douloureuse. Ce ne serait pas un besoin vital. Penser la sexualité devient alors inenvisageable. Certaines femmes ne peuvent l’envisager uniquement que par le prisme de l’amour, les blocages quand il y en a, seraient corrélés à un problème de communication. Les hommes, pour la plupart ne voient l’intérêt pas qu’il pourrait y avoir à épiloguer sur la question, le sexe serait cantonné à l’intime et pour certains considéré comme quelque chose de « sale ».C’est dommage car il y a tellement de chose à dire sur la sexualité, il suffit de constater le nombre d’ouvrages parut sur le sujet en 2019, avec des noms formidables comme Martin Page, Olivia Gazale … Il y a des choses remarquables qui sont faites à ce sujet !

Aujourd’hui il y a une multiplication de livres sur la sexualité, sur le plaisir, comment trouver du plaisir lorsque l’on est une femme ? On a levé cette chape de plomb sur le plaisir féminin. Cela ne s’est-il pas retourné contre nous en nous imposant une jouissance systématique et une frustration à contrario, comme une nouvelle injonction ?

Ce n’est pas une injonction ! Loin de là, personne n’a un pistolet pointé sur la tempe.C’est marrant parce que cette impatience n’est pas liée qu’à la sexualité, on la retrouve dans d’autres domaines, les gens ne veulent pas être conseillés. La sexualité est vécue pour certaines personnes comme un rite de passage, quelque chose situé hors du temps alors que c’est bien quelque chose de concret, de scientifique, de médical et qui plus est, apporte du bonheur !

Les injonctions vont à l’encontre des libertés, ce n’est pas le cas ici, bien au contraire, ce sont des propositions qui sont faites dans les ouvrages et les articles qui paraissent à ce sujet. Cela dit il y a toujours eu des injonctions sur la sexualité et heureusement (malgré les idées reçues) elles sont moindres aujourd’hui.

"On n’est pas sur quelque chose de sensationnel, mais sur des données, des faits concrets et on peut s’intéresser à la sexualité des 1% comme à celle des 99%. Il y a les rapports de l’IFOP également… De tout cela résulte un portrait de la société."

Vous sortez en parallèle aux éditions de La Martinière un autre ouvrage, une sorte de recueil de chroniques. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre travail en amont de chaque chronique, le choix de la thématique ? En résumé, comment travaille une chroniqueuse sexo ?

J’ai toujours un paquet de chroniques d’avance. J’ai trop d’idées ! Rien que ce matin, dans le trajet en taxi entre deux rendez-vous promo, j’ai noté 3 nouvelles idées. C’est simple, j’ai toujours mon application note ouverte sur mon smartphone. Après comme je cours après le temps, toutes ne verront pas le jour, certaines ne seront pas développées davantage. En ce qui concerne l’origine de mes idées, disons que je me documente beaucoup, je lis pas mal de revue de philo, des parutions d’économistes, des rapports de gynécologues, il y en a pléthores en France, aux USA, en Suisse, en Allemagne, en Inde … Il y a surtout des chiffres et moi je m’en nourris énormément. On n’est pas sur quelque chose de sensationnel, mais sur des données, des faits concrets et on peut s’intéresser à la sexualité des 1% comme à celle des 99%. Il y a les rapports de l’IFOP également… De tout cela résulte un portrait de la société. On est plusieurs « sexpert » et chacune à sa manière de travailler et ses sources : l’immersion, l’anthropologie l’histoire… Moi, ce sont les données chiffrées.

"On manque d’une histoire des femmes qui érotise les hommes."

On vous connaît beaucoup pour vos chroniques sexe dans le Monde, GQ, Usbek et Rica, Le Temps… Mais vous êtes également illustratrice. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? 

Alors, oui, en ce moment il y a une exposition public de mes peintures à Genève à la galerie Analix. Ce ne sont pas les illustrations de mes articles. Par ailleurs je m’intéresse beaucoup dans ces peintures au corps masculin, à ses formes, je ne pense pas qu’en tant qu’artiste femme il ne faille que m’intéresser aux corps des femmes, au contraire, il faut sortir de ce schéma « pratique » et intersexe . On manque d’une histoire des femmes qui érotise les hommes.





INFOS / En librairie Sortir du trou, lever la tête aux éditions Anne Carrière et Le Sexe selon Maïa, au delà des idées reçues aux éditions de La Martinière.

Exposition de ses peintures à la Galerie Analix de Genève, rue du Gothard 10, 1225 Chêne-Bourg, Suisse.

 

FOCUS LITTERAIRE par Soisic Belin


Sortir du trou, lever la tête.


Extrait :

« La femme contemporaine, penchée sur sa propre assistante personnelle ( Alexa, Siri…NDLR) , est priée de ne pas remarquer que des inventeurs surdiplômés transmettent sous couvert d’enthousiasme technophile un unique message, de la vaginette à la poupée et à l’assistante : les femmes de chair sont de trop. »

Dans son ouvrage paru aux éditions Anne Carrière, Maïa Mazaurette propose à son lectorat de Sortir du trou et de lever la tête. Deux propositions savamment étudiées jusque dans la composition du livre qui, en deux temps, permet un état des lieux ( sortir du trou) et des solutions (lever la tête). Si il est une injonction à suivre les yeux fermés, c’est bien sûr celle lancée par l’autrice ! Il est dorénavant inacceptable de continuer à considérer notre sexe (féminin) comme un trou et de manière plus générale, la femme dans toute sa globalité comme une béance. Le trou, notre vagin donc, serait un espace neutre, interchangeable, passif, mystérieux, malléable, à l’origine de fantasmes divers et variés. On ne lui décernerait aucune médaille puisqu’il n’est finalement rien sans le sacré pénis. « Au commencement était le pénis et la nécessité de le tremper quelque part ». A la fin malheureusement le constat reste le même, le trou est en attente d’être rempli comme un « plaisir d’offrir » et le sexe masculin, lui, tel l’épée du preux chevalier, vogue par monts et par vaux pour assouvir son insatiable besoin de percer. Finalement quelles seraient les solutions à ce fâcheux schéma si ancré, que nous l’avons tous et toutes plus ou moins conscientisé ? Les expériences exotiques, le sexe douloureux et marginal ??? Que nenni. Il serait indécent de vous spoiler les propositions faites par Maïa, mais tout a fait permis de vous conseiller de plonger à corps perdu dans cet ouvrage qui donne la banane (sans mauvais jeu de mots) et une autre réflexion sur ce que pourrait être l’avenir de notre sexualité.




Le sexe selon Maïa, Au delà des idées reçues.



Les éditions de la Martinière publient une compilation de 41 chroniques de la Sexperte parues dans Le Monde, accompagnées d’illustrations signées Charlotte Molas.

Pour ceux et celles qui ne connaissent pas la prose  « Kinki » de Maïa Mazaurette, c’est une belle occasion de la découvrir, pour les autres, c’est l’occasion d’une relecture ! L’autrice manie avec mesure humour, constats et conseils pour aller au delà des idées reçues… Je suis certaine qu’après y avoir gouter vous ne pourrez plus vous en passer ! Chanceux que nous sommes, la plume de Maia est aussi à retrouver chez GQ, Usbeq et Rica et Le Temps.

Extrait :

«  Deux poids, deux mesures : alors qu’on apprend aux enfants à «  goûter avant de dire non » (au risque de retrouver des trainées de purée carotte-camembert sur les murs) , nous nous autorisons sexuellement à ne pas goûter. À détester avant d’essayer. À ne pas se faire notre propre idée. Comment justifier ce passe-droit? La question se pose parce que l’idée de tout essayer est finalement très implantée dans notre culture sexuelle. Les prétentieux se vantent d’avoir tout essayé, les gourmands de vouloir tout essayer. »

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